vendredi 5 mars 2010

Rat-finé

On aime les cinés-goûters du Fresnoy, le troisième dimanche de chaque mois. Se retrouver en famille autour d'un film d'animation de qualité suivi d'un petit goûter. La version pour enfants des séances de cinéma suivies de débat. Titiller les papilles pour éduquer les pupilles1 ...
On s'est régalé avec Ratatouille, film d'animation américain de Brad Bird. La bouche ouverte, on suit les aventures de Rémy, petit rat qui rêve de devenir grand chef, pendant presque deux heures. Au menu, tous les ingrédients du conte initiatique ; notamment une scène prenante où Rémy risque de se noyer. Cette immersion va lui permettre de renaître sous une nouvelle identité. En effet, son goût pour la cuisine a causé sa perte et celle des siens. Ils doivent s'enfuir. Rémy, qui voulait à tout prix récupérer le livre de cuisine, arrive trop tard, et se perd dans les égoûts. Survivre à ces épreuves ne le dégoûte pas de la table des hommes. Au contraire. Des égoûts au bon goût2, on ne vous en dit pas plus...
On a dégusté ce moment proustien rien que pour les adultes, où le terrible critique à l'allure de croque-mort3 pose une bouchée de vulgaire ratatouille sur sa langue,et où, tout à coup, il retrouve le goût de la vie ; cette vie, que sa mère lui a donnée, et qu'il trouvait si injuste, un jour grisâtre de pluie où son coeur coulait à flots des larmes salées que la ratatouille, ensoleillée et colorée de sa mère, a vite assechées.4
On a savouré penser à ce petit film d'animation en présence d'autres critiques, ceux conviés au colloque Savoir et saveurs. Tout y est : Rabelais, le maniérisme et La Fontaine. La communauté des rats mange selon la diététique du pauvre : alternances de jeûnes et de carnaval. Rémy, lui, tente d'accèder à celle des aristocrates, les hommes. Le maniérisme. La soupe de Rémy obtient du succès grâce à la pincée d'exotisme de la cannelle. Sa ratatouille est présentée avec un souci esthétique. Héritière des préceptes d'Augusto, elle a le goût de l'Italie. Et aussi de la campagne : Rémy, le rat des champs, impose des plats rustiques et simples.Enfin, saveurs et savoirs sont indissociées chez les hommes comme chez les rats. Pour le méchant chef cuisinier, l'apprenti-idiot sait forcément qu'il est le fils d'Augusto, puisqu'il sait cuisiner. Quant au frère de Rémy, il est choqué autant par le savoir-lire que par le savoir-cuisiner.

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